La France oubliée

LA FRANCE OUBLIEE

Bien des commentaires et des analyses se succèdent sur le mouvement des « Gilets jaunes » tentant de comprendre le pourquoi et surtout le jusqu’où de ces citoyens qui jour après jour, nuit après nuit, campent un peu partout en France, faisant bruisser un vent de révolte…

Le modèle social français a été depuis un an non pas juste égratigné par Emmanuel Macron mais proprement déchiré. Partout, ces classes populaires signifient leur ras-le-bol : ras-le-bol de tout pêle-mêle : la hausse de l’essence, de la CSG, la suppression des contrats aidés, la baisse des APL… C’est un profond sentiment d’injustice sociale et fiscale qui est le moteur du mouvement puisque ces mesures se doublent de la suppression de l’impôt sur les grandes fortunes, le maintien du CICE et l’attaque sur les services publics.

Je voudrai dans le paysage ajouter un élément de réflexion qui, il me semble, alimente la révolte. Le choix des gouvernements qui se succèdent est le même en ce qui concerne l’aménagement du territoire : METROPOLISATION à tous les étages ! Cette France des métropoles construit sur son côté face une France oubliée, désertée par les emplois et les services publics.

Cette France-là « monte » à Paris depuis 4 semaines, Paris devenu symbole du territoire riche, pour aussi dénoncer cette déconstruction d’une solidarité et d’une égalité nationale.

Ce choix est lourd de conséquences, mais j’ai citerai deux :

La France rurale, la France périphérique est dépouillée de ses services publics. Trains, hôpitaux, tribunaux, écoles… ferment induisant de fait deux réactions chez les citoyens concernés : un profond sentiment d’abandon, mais aussi la remise en cause de l’impôt censé assurer une redistribution. Le modèle de la métropolisation nuit gravement au développement harmonieux du territoire prenant en compte les hommes et la question écologiques. En effet, obliger de nombreux français à multiplier les trajets en voiture est contraire à l’objectif de transition écologique que tente d’afficher ce gouvernement, cela ne fait que repousser les classes populaires aux franges de la métropole, car en son cœur la vie chère règne et nourrit le sentiment de déclassement.

La seconde conséquence est une attaque sans précédent sur le premier échelon démocratique de notre République : la Commune. En effet, la loi NOTRE étant passée par là, les communes sont enjointes de transférer de nombreuses compétences à de nouvelles assemblées (Etablissement Public de Territoire ou Métropole) non élues. Plus fort, on demande aux conseils municipaux d’approuver les délibérations signifiant les transferts des personnels.

Ainsi, au dernier conseil municipal de Champigny, ville de 76 000 habitants de la banlieue parisienne, en pleine mutation, l’Assemblée municipale devait approuver de se couper un bras : le bras du développement économique au profit de l’EPT, dirigé par le maire d’à côté…

Que peut-il advenir alors du choix politique de la commune, sans ressource au sein du personnel municipal, d’assurer aussi le développement économique de son territoire et donc d'améliorer le rapport emploi/habitat ? C’est pourtant la seule garantie de cesser les déplacements pendulaires de trop nombreux franciliens, d’améliorer les conditions de vie des salariés, ainsi que d’en finir avec les banlieues dortoirs.

Comble du cynisme, le Président Macron a annoncé lors de son allocution du 10 décembre, qu’il allait faire appel… aux maires pour tenter d’amortir la grogne sociale, déclenchée par la politique du dit Président. Plus de bras, plus de jambes, mais vous pouvez toujours porter ma voix !

J’ai toujours dénoncé la loi NOTRE comme une ineptie, autrement dit la métropolisation comme une vision réductrice de l’aménagement du territoire.

Les Gilets Jaunes sont là pour rappeler que la France oubliée ne se laissera plus faire. Le Président, dans ses maigres propositions passe complètement à côté du principal.

La demande dépasse largement les 100 euros, royalement accordée à certains…

Il n’est pas question de miettes mais bien de politique au sens noble du terme « organisation de la vie de la cité ». Ainsi, la France oubliée se rappelle aux gouvernants pour exiger de pouvoir bien vivre et bien travailler en France.